070 barter agreements - mushroom huntingDepuis une décennie au moins l’économie de compensation (barter en anglais) est l’objet d’une croissance aussi spectaculaire que discrète car elle a une caractéristique intéressante : c’est un commerce silencieux.
Selon, l’Organisation Mondiale du Commerce, le barter représentait quelques 15% des échanges internationaux (soit 8,43 milliards de dollars) aux Etats-Unis. Le « Barter » ou troc interentreprises est une pratique née dans le contexte de la crise de 1929 aux Etats-Unis. Pour se développer des années plus tard suite à une pénurie de devises due aux nombreuses crises économiques en Argentine, Brésil, Russie, etc. Mais il était surtout très développé dans les pays anglo-saxons qui l’ont adopté afin de faciliter leur pénétration des marchés des pays en voie de développement. Actuellement il est un levier économico-politique très utilisé par les chinois et les indiens.
Pour le ministère français du Redressement productif, ce type d’échanges inter-entreprises concernerait plus de 500 000 entreprises françaises pour un chiffre d’affaires évalué à plus de 1,5 milliards d’euros. Toujours en France, les études sur les perspectives de ce marché montraient que si très peu d’entreprises connaissaient le barter, elles étaient à 65 % intéressées par l’échange de biens et de services dans un contexte économique difficile et une période de restriction budgétaire. Selon l’étude en question le barter pourrait être un des relais de croissance pour nos PME. Il apporte une solution aux problèmes ponctuels de trésorerie et de liquidités et surtout l’occasion de créer ou de redynamiser des relations commerciales un tant soit peu innovantes.

fur-tradingSelon certains experts, la compensation est habituellement utilisée parce qu’elle est l’alternative de « second best » confirmant l’hypothèse qu’elle répond à des imperfections des marchés tout en offrant des leviers pour des incitations économiques et politiques éventuellement fortes entre nations. Dans ces derniers cas, la compensation peut créer une barrière stratégique – comme nous le soulignions plus avant- contre des concurrents. Par exemple un pays qui achète à un autre des matières premières en contrepartie de marchés de constructions de routes, ce qui pose de délicats problèmes de politique étrangère car il s’agit de transactions pratiquées entre deux Etats afin de réduire leur taux d’endettement. Le batter est une opération de troc, un échange compensatoire qui peut être plus ou moins complexe et n’est pas sans risques économiques et politiques lorsqu’il s’agit de contrats de compensation entre pays.
Entre entreprises, les accords de troc ou de contre-achat se traduisent par une vente – par exemple – de matières premières ou de pétrole proposés par l’acheteur en contrepartie, par exemple, d’un équipement à haute valeur technologique. S’il accepte d’être payé en partie ou en totalité avec des matières premières le vendeur soit les revendra lui-même – avec son service spécialisé – soit en confiera la vente à un tiers – une société spécialisée dans la compensation – afin de récupérer le règlement qu’il est en droit d’attendre en contrepartie de la vente de l’équipement fourni. Lorsque l’offre et la demande entre les deux firmes intéressées, souvent de pays différents, ne collent pas, la société de barter va chercher un ou plusieurs autres partenaires susceptibles de participer au troc. Par exemple, la société sénégalaise A, qui manque de liquidité et d’ouverture vers des marchés étrangers, souhaite échanger une récolte d’ananas contre des charpentes métalliques fournies par une société B en France mais qui n’est pas intéressée par le troc. Le barter intermédiaire va chercher un acheteur de la récolte – qui pourrait se trouver en Pologne ou en Belgique – qui va payer la société B en lieu et place de A. Le Barter devient le garant de la bonne fin de la transaction.

D’une façon générale ces sociétés de compensation et de troc facilitent l’écoulement de matières premières ou des équipements déclassés et donc soldés. Le troc utilise des méthodes de crédit vendeur/acheteur qui facilitent le fonctionnement d’une bourse d’échange « asynchrone » (une affaire se fait en pariant sur une compensation à venir). Pour ce métier de l’intermédiation la Toile est la bienvenue qui facilite le rapprochement de l’offre et de la demande d’où une forte croissance prévue dans les années à venir, soit environ 600 millions d’euros pour le seul marché européen . Le Barter est considéré comme efficace pour réaliser des ventes additionnelles pour des liquidations de stocks et trouver de nouveaux clients. L’entreprise intéressée peut utiliser une plate-forme de marché qui l’aidera à « troquer » – contre une commission – un bien dont elle souhaite se débarrasser ou un service qu’elle est en mesure de rendre contre un autre qui lui est nécessaire tout en lui épargnant la sortie de liquidité, pratique déjà courante dans les agences de publicités. A condition d’être utilisé à bon escient, le troc peut se révéler un formidable outil de recrutement de nouveaux clients et de développement du chiffre d’affaires au prix de quelques précautions. Ce système s’est progressivement développé avec des résultats contrastés pour connaitre récemment un essor renouvelé avec l’émergence de plates-formes d’intermédiation dématérialisées.

Bartering : avec Internet le troc entre entreprises s’offre une seconde vie. Ce nouveau type de places de marché sur lesquelles les professionnels peuvent se rencontrer pour échanger produits et services dans un cadre juridique sécurisé est devenu un instrument incontournable entre entités internationales souhaitant des accords de réciprocité en matière de service et d’assistance aux « trocs » envisagés. Grâce à l’internet les modèles d’affaires les plus divers ont prospéré durant ces dernières années, mais contrairement à ce qui est souvent affirmé, le bartering n’est pas uniquement la conséquence du succès d’une économie grise qui tenterait de contourner l’économie traditionnelle. Depuis le début du siècle, l’économie de la coopération, du partage et des échanges les plus divers est désormais bien ancrée dans nos mœurs grâce à l’Internet. On ne compte plus les applications, que je qualifierais de « coopératives », accessibles sur la Toile : Création de tontines pour financer des projets originaux, covoiturage, échange d’appartements, de maisons, de véhicule. Les ressortissants de nombreux pays font ainsi d’excellentes affaires en participant à cette circulation de « deuxième main ». Dans un climat économique marqué par un déficit de trésorerie, l’échange ou « troc BtoB » présente de nombreux avantages pour l’entreprise qui veut répondre à ses besoins ponctuels comme stratégiques ou réaliser un investissement (matériel, technologique ou en communication…) ; d’autre part, il permet d’optimiser des capacités inexploitées (stock, collaborateurs) ; le tout en s’ouvrant à de nouveaux partenaires commerciaux tout en préservant leur trésorerie. Autre avantage du troc entre entreprises: tout le monde peut y participer -quel que soit le secteur d’activité et la taille de l’entreprise. Avec ce type de services d’intermédiation les PME peuvent elles aussi pratiquer ce type de commerce y compris avec des multinationales lorsque leurs besoins sont complémentaires.

Bartering  Du coté des sociétés de bartering ces dernières années, elles ont du se diversifier ou fusionner pour survivre. En effet, comme la valeur moyenne d’un échange se situe aujourd’hui autour de 4 000 euros, ce montant laisse une faible commission aux places de marché spécialisées (5% communément). Or le modèle de la commission sur transaction comme celui de l’abonnement ne garantissent pas de revenus suffisants. Ce sont les échanges internationaux multilatéraux nécessitant beaucoup plus de valeur ajoutée (conseil et assistance) qui leur ont permis de survivre. L’arrivée de l’internet a changé complétement la donne et apporté un nouveau souffle à une activité alors en faible développement. Le troc « on line » devient un nouvel outil de gestion à intégrer dans la stratégie des entreprises. Barterforum et Efficio sont deux exemples de sites de Barter en ligne qui se disaient rentables grâce à internet qui a fait exploser le nombre d’adeptes de ce modèle d’affaires. Batertrust.com créée en 1999, a survécu grâce à une importante levée de fonds consacrés à l’achat de trois sociétés de bartering offline. Ainsi, lorsque Bartertrust a lancé son service en ligne, elle était déjà dans une démarche click and mortar en axant sa stratégie sur le développement international.

Après des décennies de méfiance, entrainé par le succès de la formule dans les pays anglo-saxons, le marché européen est en pleine expansion. L’IRTA (International Reciprocal Trade Association), fournit des statistiques sur un secteur longtemps confidentiel. Ainsi en 2010, il se serait échangé pour plus de 18 milliards d’euros de biens et services en Amérique du Nord, dont 10 milliards auraient transité par plus de 500 intermédiaires. Près de 450 000 entreprises ont utilisé l’échange marchandises. Si les volumes ont crû au rythme de 8 % par an au cours de la deuxième moitié des années 1990, l’IRTA prévoit pour les prochaines années une augmentation annuelle de 15 %, essentiellement du fait du bartering en ligne. Un signal fort pour celles de nos entreprises qui cherchent un second souffle afin de revitaliser leurs politiques commerciales.

Denis Ettighoffer Décembre 2014

Pour en savoir plus : http://www.e-barter.fr/
http://www.chacunsatribu.com/des-idees/actu/troc-party-paris.htm
http://www.barterbusiness.fr/barter-communaute-affaire.php
http://www.pressmyweb.com/ecommerce-ebusiness/startup-e-barter-troc-et-opportunites-daffaires-pour-b2b/
http://www.parisincubateurs.com/b2b-en-trade-barter-echange-services-entre-entreprises-gratuitement
http://www.journaldunet.com/0104/010404barter.shtml
http://www.01net.com/editorial/149927/bartering-le-troc-entre-entreprises-soffre-une-seconde-vie/
http://www.efficio.com/
http://www.irta.com/
http://www.activeinternational.fr/
http://www.barterbusiness.fr/equipe.php
http://www.english.rfi.fr/france/20120430-back-barter-france
http://www.actionco.fr/Action-Commerciale/Article/Barter-prospecter-a-moindre-cout-535-1.htm

 

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A propos de l'auteur

Denis

Denis Ettighoffer, fana de science-fiction, auteur de « L’entreprise virtuelle », le livre qui l’a fait connaître en 1992 est un des spécialistes français reconnus dans l’étude projective de l’impact des TIC (Technologies de l’Information et de la Communication). Ses contributions à la réflexion sur les évolutions des sociétés, des modèles économiques et organisationnels sont nombreuses. Sa spécificité réside dans sa capacité à analyser le présent, pour en extraire les orientations économiques et sociétales stratégiques pour les décennies à venir. Son parcours atypique aura forgé chez lui une pensée singulière. Son dernier livre, « Netbrain, planète numérique, les batailles des Nations savantes » (Dunod) a reçu le prix du livre du Club de l’Economie Numérique en 2008. Denis Ettighoffer un temps Membre correspondant de l’Académie de l’Intelligence économique collabore désormais avec l’équipe d’IDEFFIE (Développement de l’expertise française et francophone à l’international et en Europe ) .

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