httpsearchDans une contribution d’octobre 2008[1], je soulignais les risques juridiques encourus par la Syndication des contenus, c’est-à-dire la composition de documents à partir de sources différentes qui brouille encore plus le problème du copyright. L’accusation de copie par la pratique de l’embedding consistant à insérer les citations, vidéos ou flash venus d’un autre site dans son propre travail pose la question du degré de « parasitisme » acceptable par rapport aux apports originaux du ou des auteurs réels. Le résultat du procès entamé par le groupe GateHouse Media en décembre 2008 contre le New York Times aura, de ce point de vue, valeur d’exemple.

Le groupe du NYT est mis en cause pour violation de copyright parce que certains de ses articles affichent des liens vers des publications en ligne de Gatehouse. Il s’agit d’un usage extrêmement courant sur la plupart des sites, des blogs et surtout chez les « aggrégateurs » de contenus comme Google ou Yahoo et autres centres de documentation en ligne. Si  la justice donnait raison au plaignant, le principe d’extraits d’articles donnant ensuite le lien vers l’auteur d’origine serait remis en cause. C’est toute une industrie des contenus qui risque de disparaitre corps et biens. Selon des commentaires de quelques observateurs sur le procès, GateHouse pourraient être à la recherche de droits d’auteurs en imposant un paiement pour tous les liens dirigeant vers ses contenus. L’affaire n’est pas nouvelle, les pratiques des hyperliens donnent lieux à des conflits constants[2]. En cas de succès de la demande de GateHouse on peut imaginer que l’on aura repoussé encore une fois le rêve d’une libre circulation des informations et durcit le copyright. Cette accusation de détournement de liens pour de supposés détournement de propriété intellectuelle est en réalité motivée par le fait que l’accès direct sur une page diminuerait le passage par des pages de pub. Même mésaventure pour Power.com. Il s’agit d’une start-up brésilienne qui a conçu  un agrégateur  de contenus et de liens permettant de se connecter à différents réseaux sociaux depuis une seule et même interface. Cette interface permet de suivre automatiquement les divers évènements pouvant affecter les réseaux surveillés. Pour cela Power.com crée un observatoire personnalisé et protégé pour le compte de ses adhérents et  assure ensuite la compilation et la signalisation des évènements à surveiller dans les réseaux sociaux. Pour Facebook, cette application qui récupère des informations dans les différents réseaux, viole  la propriété intellectuelle et les marques de ce dernier tout en pratiquant une concurrence déloyale. Snake_failsLa firme a bloqué l’accès de ses services depuis Power.com en attendant une décision de justice et réclame des dommages et intérêts. Pendant la dernière guerre les belligérants ne manquaient jamais de faire disparaître ou de modifier les panneaux indicateurs afin de limiter et gêner l’avance des troupes adverses. A-t-on pesé les conséquences d’une limitation de la circulation des informations sur la Toile ? Imaginez un instant des techniques, des procédures juridiques qui permettraient de raréfier les « indicateurs » qui permettent de s’informer sur la Toile. Imaginez que l’on limite le pouvoir des hyperliens de nous faire découvrir des univers qui sortent de l’information ordinaire traitée par la presse traditionnelle, chose mainte fois constatée avec les blogs. Imaginez par exemple, que l’on crée sous la pression d’un lobby quelconque une loi qui  empêcherait de mettre des liens vers des sites ou des informations qui dérangent des intérêts privés ou publics. Comment s’y prendrait-on selon vous, sinon en mettant les hyperliens en coupe réglée. Qui maitrise l’économie des liens maîtrise une part de l’économie et du droit à l’accès à l’information. Vous pariez que cela n’échapperait pas longtemps à certains ?


[1] https://www.ettighoffer.fr/349/renover-le-copyright-un-imperatif-de-l%E2%80%99economie-numerique#more-349

[2] http://www.linksandlaw.com/linkingcases.htm

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A propos de l'auteur

Denis

Denis Ettighoffer, fana de science-fiction, auteur de « L’entreprise virtuelle », le livre qui l’a fait connaître en 1992 est un des spécialistes français reconnus dans l’étude projective de l’impact des TIC (Technologies de l’Information et de la Communication). Ses contributions à la réflexion sur les évolutions des sociétés, des modèles économiques et organisationnels sont nombreuses. Sa spécificité réside dans sa capacité à analyser le présent, pour en extraire les orientations économiques et sociétales stratégiques pour les décennies à venir. Son parcours atypique aura forgé chez lui une pensée singulière. Son dernier livre, « Netbrain, planète numérique, les batailles des Nations savantes » (Dunod) a reçu le prix du livre du Club de l’Economie Numérique en 2008. Denis Ettighoffer un temps Membre correspondant de l’Académie de l’Intelligence économique collabore désormais avec l’équipe d’IDEFFIE (Développement de l’expertise française et francophone à l’international et en Europe ) .

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