Qwant, le moteur de recherche européen peut-il se réinventer sans trahir ses fondamentaux ? Qwant n’a ni trouvé son positionnement, ni son modèle économique. Qwant, le moteur de recherche qui oublie vos recherches, est-ce une bonne idée ? Nous n’en sommes pas convaincus. Nous proposons qu’il s’étoffe en devenant un « métamoteur ». L’élément différenciateur mis en avant par Qwant par rapport à Google (ou d’autres), c’est que son moteur de recherche respecte la vie privée, ne collecte pas et n’exploite pas les données des transactions des internautes. Qwant joue la carte de la transparence absolue en dehors de l’installation d’un cookie permettant de conserver votre session active. Mais, faut-il le souligner, les bons sentiments ne font pas de la marge ! Le modèle économique du moteur de recherche européen, se concentre, d’après ce que nous en savons, sur le sponsoring et une commission sur les achats passant par Qwant. Ce qui, au passage, élimine la source de revenus publicitaires de type « Adsens ». Un pari risqué car pas très rentable si ont en croit les résultats.

Finalement un panel de services plutôt sympa mais décevant à utiliser malgré des améliorations du design (ergonomie) :  accès lent et pauvreté des résultats comparé à son concurrent. Personnellement j’ai tenu plusieurs mois mais pratiquement toujours je revenais au moteur de recherche de Google et il n’y avait pas photo ! Entre-temps j’ai appris que Qwant était adossé au moteur de recherche Bing de Microsoft[1]. L’annonce de la volonté de la direction d’une plus grande autonomie du moteur ne répond pas à la question que doit se poser chaque investisseur : où est l’originalité de Qwant et sa capacité à dégager de la marge ? Comme l’écrivait Gabriel Thierry, Google directement ou indirectement offre aux milliards d’internautes une quantité phénoménale de services en ligne. Son pouvoir d’attractivité est et reste considérable. La concurrence est dure et le positionnement actuel du moteur de recherche européen pourrait devenir intenable ! Tout à son idée de se confronter au modèle Google pour devenir un instrument de la réussite européenne en matière de moteur de recherche Qwant ne s’est-il pas trompé de voie[2].

Pour moi Qwant doit faire bouger son modèle économique ; Qwant doit devenir un « méta-moteur » de recherches comme je le proposais fin des années 90[3]. Le Qwant du futur doit devenir un « renifleur » utile et un « observatoire des connaissances » Prenons la précaution de préciser qu’il n’est pas question de revenir sur les services similaires « d’Answers à la demande » de Yahoo et de Google aujourd’hui fermés.

Le marché des moteurs de recherche dont on parle peu fait toujours l’objet de manœuvres stratégiques d’ampleur. Le marché a déjà laissé de nombreux cadavres sur le terrain. Eurekster – disparu – permettait de partager vos recherches avec votre réseau et d’y convier vos contacts. Eurekster personnalisait vos recherches en se « souvenant » des requêtes que vous aviez effectuées dans le passé. Ainsi, contrairement à Qwant, le moteur en tenait compte pour vos recherches futures. Enfin, SearchPublisher, sous-produit de Eurekster, offrait la possibilité d’incruster un moteur de recherche personnalisé dans un site web. Un temps AllTheWeb aura été un concurrent sérieux de Google avant de rejoindre Yahoo search.  Kaltix moteur de recherche personnalisé a été racheté en 2003 par Google et fait l’objet d’une plainte, accusée de payer Apple pour ne pas lui faire concurrence en lançant son propre moteur de recherche alors que le chinois Huawei s’entend avec celui de Qwant afin de contourner l’interdiction de travailler avec les sociétés américaines. Nous sommes convaincus qu’il y a là, une piste pour rajeunir la gamme de services qu’offre le moteur de recherche Européen : devenir un méta-moteur.

[1] Selon un audit réalisé par la direction interministérielle du numérique en aout 2019, 63 % des résultats obtenus sur Qwant proviennent de Bing. Qwant doit réduire la voilure pour ne pas accentuer ses pertes.

[2] https://www.lesnumeriques.com/vie-du-net/les-zones-d-ombre-de-qwant-l-enquete-de-mediapart-n139645.html

[3] Notre « Vigie » se focalisait sur un thème choisi et pratiquait l’effraction dans les réseaux pour en tirer un mix d’infos pertinentes notamment en fouinant dans les forums.

 

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A propos de l'auteur

Denis

Denis Ettighoffer, fana de science-fiction, auteur de « L’entreprise virtuelle », le livre qui l’a fait connaître en 1992 est un des spécialistes français reconnus dans l’étude projective de l’impact des TIC (Technologies de l’Information et de la Communication). Ses contributions à la réflexion sur les évolutions des sociétés, des modèles économiques et organisationnels sont nombreuses. Sa spécificité réside dans sa capacité à analyser le présent, pour en extraire les orientations économiques et sociétales stratégiques pour les décennies à venir. Son parcours atypique aura forgé chez lui une pensée singulière. Son dernier livre, « Netbrain, planète numérique, les batailles des Nations savantes » (Dunod) a reçu le prix du livre du Club de l’Economie Numérique en 2008. Denis Ettighoffer un temps Membre correspondant de l’Académie de l’Intelligence économique collabore désormais avec l’équipe d’IDEFFIE (Développement de l’expertise française et francophone à l’international et en Europe ) .

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